PAPOUASIE : Chez les Papous, il y a….

Pour fêter ce début d’année 2016, je vous propose de prendre la direction de la Papouasie ! Comme vous l’avez probablement compris de mon précédent post, nous avons passé avec mes amis Luc, Julie et leurs enfants sur leur Voilier Bulle un mois merveilleux au Raja Ampat, un archipel situé au Nord-Ouest de la Papouasie indonésienne.

Chez les Papous, il y a…

Apprenant que j’étais en Papouasie, une copine me demandait si je connaissais le petit exercice de diction suivant, tout droit sorti de Gaston Lagaffe, auquel nous pourrions nous entraîner avec les enfants sur le bateau :

Chez les Papous…

y’a des papous papas

y’a des papous pas papas

y’a des papous papas à poux

y’a des papous papas pas à poux

y’a des papous pas papas à poux

y’a des papous pas papa pas à poux

… et ça dure comme ça un certain temps (en tout cas, celui de s’arracher un peu les cheveux) … jusqu’à « y’a des papous époux pas papas pas à poux pas papas ». Trop facile, non ? A vous de jouer

Après cette introduction à « forte » valeur ajoutée culturelle, je ne peux m’empêcher d’ajouter tout de même un poil de contexte. Quand on entend « Papouasie », on pense généralement à la Papouasie Nouvelle-Guinée (familièrement appelée « PNG » par les initiés)… Que nenni, malheureux ! Erreur de débutant !!! La « PNG » ne représente qu’une moitié de la Nouvelle Guinée, la plus grande île du monde après le Groenland.

La Nouvelle Guinée se divise en effet entre le pays souverain de Papouasie Nouvelle-Guinée, à l’Est ( la fameuse PNG), et les provinces indonésiennes de Papouasie et Papouasie occidentale, à l’Ouest (connues jusqu’à récemment sous le nom d’une province unique : l’Irian Jaya).

Ici, je parle donc de la Papouasie indonésienne, où nous naviguions. Et plus précisément, du Raja Ampat, un chapelet d’îles à l’ouest de la Papouasie occidentale. Suivez la flèche rouge pour situer.

Carte generale situation raja ampat map

Influences variées…

La Nouvelle Guinée aurait été abordée pour la première fois au XVIème siècle par les Portugais. Sous influence hollandaise du XVIIème siècle à 1962, la Papouasie est restée extrêmement sauvage et peu explorée jusqu’à récemment. Dans un article du Monde écrit dans années 1960 que j’ai lu l’autre jour, le journaliste évoque carrément les Papous comme vivant à l’âge de pierre.

Pendant la seconde Guerre Mondiale, la Papouasie a été un point névralgique des batailles entre Alliés et japonais. D’où cette anecdote incroyable (mais vraie) du soldat japonais Teruo Nakamura capturé en 1974 dans la forêt de Morotai par la Indonesian Air Force. Vingt neuf ans après la fin de la guerre, il ignorait que celle-ci était finie depuis belle lurette et continuait de se cacher, en survivant grâce aux trésors de dame nature et de rapines dans les villages, ce qui a fini par alerter sur son existence. Il existe quelques histoires similaires à Palau et aux Philippines : vraisemblablement, il y a eu un petit problème de communication entre l’empire du soleil levant et ses soldats nippons égarés. Avec une bonne 3G, c’est sûr, tout cela ne serait pas arrivé 🙂

Dans les trois décennies qui ont suivi le retrait des hollandais, des migrants des autres îles d’Indonésie sont venus tenter leur chance en Papouasie, mais peu se sont aventurés en Papouasie occidentale. Aujourd’hui, les opportunités de travail dans l’industrie minière, pétrolière, l’abattage du bois et le tourisme y attirent davantage d’indonésiens et de migrants étrangers.

… mais mélanésienne surtout

Culturellement, la Papouasie conserve une identité forte, ce qui explique d’ailleurs que le gouvernement central de Jakarta encourage ces déplacements récents de population des autres îles vers la Papouasie, afin de lui transférer une culture plus « indonésienne ».

On y parle plus de quatre cents dialectes, qui ne se comprennent pas entre eux : seul le Bahasa Indonesia – la langue officielle d’Indonésie – est compris de tous. C’est d’ailleurs un problème qu’on retrouve au niveau national : quand l’Indonésie a cherché un dialecte majoritaire pour en faire la langue officielle, elle a dû en créer une de toute pièce en puisant ses racines dans le malais – la langue des échanges commerciaux et aussi la seule capable d’être comprise dans toutes les îles de ce pays si étendu.

En Papouasie – comme dans beaucoup d’îles du Pacifique vivant essentiellement d’une économie de subsistance – on ressent surtout l’influence de la culture mélanésienne traditionnelle. Par exemple, les terres – comme la mer – n’appartiennent pas au gouvernement indonésien mais aux grandes familles locales, souvent les plus anciennes des villages. L’appartenance des fonds marins et des récifs aux populations locales – même dans les îles inhabitées – est un trait commun à tous les peuples du Pacifique. Contrairement à chez nous, où la mer fait partie du domaine public. Cette coutume s’appelle ici le Adat.

De la même manière, dans beaucoup d’endroits que nous traversons, la population respecte encore le sasi. C’est un système traditionnel de conservation répandu dans les sociétés du Pacifique, qui vise à protéger les ressources marines en alternant zones, périodes et espèces pêchées selon des règles éditées par les chefs, pour leur laisser le temps de se reproduire. Une sorte de jachère de la mer, quoi !

Enjeux humains et environnementaux

Située au-dessus d’une zone de convergence de tectonique des plaques, la péninsule de Papouasie occidentale est considérée comme l’environnement tropical marin le plus riche et le plus diversifié au monde (je vous prépare un petit billet dédié plein de photos de plongée et snorkelling).

Les raisons géologiques qui expliquent la richesse sous-marine incomparable de la Papouasie occidentale justifient aussi la présence de nickel et nombreux autres minerais. La région est riche en matières premières et le nombre de permis – délivrés au niveau national par l’Indonésie – autorisant l’exploration sous-marine à la recherche de dépôts de pétrole et de gaz n’a cessé d’augmenter, sans prendre en compte les enjeux environnementaux.

Et surtout, sans que l’exploitation de leurs ressources bénéficie réellement aux papous eux-mêmes, provoquant une tension importante. Un mois avant notre passage à Sorong (la grande ville du Raja Ampat sur la côte ouest de la péninsule où nous nous sommes arrêtés pour faire les appros), des manifestations papoues anti-gouvernement indonésien avaient lieu pour protester contre la hausse de l’exploitation pétrolière.  

Par ailleurs, l’Indonésie doit trouver des moyens de nourrir sa population en augmentation constante. Durant notre séjour, nous sentirons jusqu’au Raja Ampat les effets des terribles incendies qui ravagent depuis plusieurs mois Java et Bornéo, provoqués par l’habitude de la culture sur brûlis et celle de l’huile de palme (cendres et odeurs de brûlé seront apportées régulièrement par le vent jusqu’au bateau, alors que nous sommes à des milliers de kilomètres des incendies).

La Papouasie n’est pas épargnée et des plans de production agricole à échelle industrielle impliquent de couper bon nombre de forêts papoues, ce qui provoquera inévitablement l’érosion des sols et l’étouffement des récifs environnants. Enfin, comme partout, la pêche illégale sévit et nous avons pu voir à certains endroits des traces évidentes encore récentes de pêche à la dynamite.

Sorong : une grande mixité

La population de la Nouvelle-Guinée constitue une mosaïque de types raciaux très variés. On y rencontre des groupes à tendance polynésienne, mélanésienne, malaise, micronésienne et des Négritos. A Sorong – la seule grande ville du Raja Ampat, située sur la péninsule, où nous nous arrêterons pour faire les appros et gérer l’administratif – cette mixité est frappante. Mais parmi la population, on identifie facilement les natifs papous : peau foncée, cheveux frisés, lèvres charnues et nez épatés… on se rapproche clairement du type mélanésien et aborigène. Et on sent aussi la lointaine influence des tout premiers migrants venus d’Afrique il y a plus de 50 000 ans.

Les habitants ont l’air de vivre en harmoniemême si les quartiers semblent tout de même assez clairement délimités selon les croyances religieuses (mosquées ici, églises là…). Au marché, les étals se côtoient mais à y regarder du plus près, on observe cependant des « regroupements », du moins du côté des papous (et certainement pas parce qu’ils ont des poux, cf l’exercice de diction au début de ce billet :)).

Sorong marche papoues
Sorong marche
Sorong-marche-papoue.jpg
Sorong marche coco
Selfie-rue.jpg
Sorong vendeur rue
Sorong marche roulant
Sorong marche vendeuses
Selfie marche

Incursion en village papou

En-dehors de Sorong, nous avons malheureusement eu peu l’occasion de croiser les papous pendant notre séjour. Contrairement au reste de l’Indonésie, il n’y a pas des villages partout au Raja Ampat, particulièrement dans les îles où nous nous sommes arrêtées. C’est l’avantage du bateau que de pouvoir aller dans des endroits reculés sans se soucier de trouver un logement… mais aussi parfois son inconvénient, puisqu’on a peu d’interactions dans ce cas avec la population locale.

Dans le Nord, nous avons tout de même eu l’occasion d’aller à terre et d’arpenter quelques villages ! Propreté absolue (aucun papier ou bouteille plastique ne traîne par terre, Mr Propre semble être passé par là contrairement à Sorong dont le port ressemble à une véritable poubelle), des chemins tamisés au râteau encadrés de jolies maisons simples et de jardins taillés au cordeau (comme on avait pu le voir aux Marquises l’an dernier). On sent que c’est leur fierté (et probablement aussi un peu leur passe-temps) d’entretenir leur lieu de vie ! Et là encore on sent l’influence de la culture des populations du Pacifique, très concernées par leur environnement puisque c’est leur principale ressource.

Papouasie village ponton3
Papouasie village ponton2
Jeunes Papaoues Penemu

 

Dans les îles, on vit essentiellement de la pêche et de l’agriculture de subsistance (taro, fruits etc). Les conditions de santé et d’éducation sont encore très précaires, quand elles sont existantes. Dans les deux villages que nous traversons cependant, les maisons ne sont plus de type traditionnel : vraies planches en bois et tôle ondulée ont remplacé le bambou et les feuilles de palmier ! Ils ont probablement bénéficié des subsides du parc ou de l’Indonésie pour construire des maisons plus modernes.

En revanche, le sourire franc et entier est bien là, l’oeil malicieux, l’accueil hyper chaleureux et l’envie de nous aider malgré la barrière de la langue, qui est une vraie plaie et une grande frustration de part et d’autre.

Papouasie village rue

Papouasie village maisons

Papouasie village epicerie

 

Bref, je ne peux pas vous en dire beaucoup plus, mais chez les Papous, comme partout

y’a des papous papas

y’a des papous pas papas

y’a des papous papas à poux

y’a des papous papas pas à poux

y’a des papous pas papas à poux

y’a des papous pas papa pas à poux

… etc etc

 

A plus tard pour la suite des aventures en Papouasie ! Et j’espère bien sûr que vous avez passé une merveilleuse fin d’année 2015. Cette année c’est vacances de Noël au balcon en France, si j’ai bien compris. Pour ma part, j’ai passé aux Philippines mon tout premier Noël et réveillon tropical… un peu difficile de se plonger dans l’esprit de Noël par 30°C, c’est sûr.

 

Partager cet article

Et si l’extra n’était pas (si) loin de ton ordinaire ? Ose créer la vie *extra*ordinaire qui te ressemble !

Image de Raphaelle Gasse (aka WanderfullRaph)

Raphaelle Gasse (aka WanderfullRaph)

Au travers de contenus inspirants gratuits, de formations en ligne et de mentorings sur mesure, j’insuffle l’énergie du mouvement et l'audace des possibles aux personnes qui rêvent de se mettre en mouvement vers la vie *extra*ordinaire à laquelle ils aspirent.

En savoir plus sur moi

Une réponse

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *