J’ai commencé à vous parler de la Papouasie indonésienne dans mon précédent billet. C’est aujourd’hui au Raja Ampat – un chapelet d’îles appartenant à la Papouasie occidentale – que j’aimerais consacrer cet article. J’ai eu la chance d’y naviguer avec le voilier Bulle de mes copains Julie et Luc durant quatre semaines en novembre 2015.
Raja Ampat : Le royaume des Quatre Rois
En Papouasie, c’est la région du Raja Ampat (littéralement : « les quatre rois » en Bahasa Indonesia, nom lié aux quatre grandes îles qui le composent) qui se développe touristiquement le plus depuis une grosse dizaine d’années. Situé au Nord Ouest de la péninsule, cet archipel s’étend sur 4,5 millions d’hectares, de la grande île de Misool au Sud à la magnifique île de Wayag au Nord. On est encore à des années lumière du tourisme de masse, du fait de la difficulté d’accès de la zone et du manque d’infrastructures, mais il y aurait déjà une poignée de milliers de visiteurs chaque année.
Ce sont essentiellement des amateurs de plongée sous-marine qui viennent ici faire des séjours plongée sur des bateaux liveaboard ou dans les quelques hôtels éco-conçus et haut de gamme qu’on y trouve, comme le Misool Eco Resort (MER) au Sud ou le Raja4Divers au Nord. Même si des options un peu moins coûteuses existent, le tourisme ici reste assez sélectif pour le moment.
Pour les raisons déjà évoquées d’appartenance des fonds marins, ce n’est qu’au terme d’accords avec les chefs locaux que ces initiatives touristiques ont pu voir le jour. Ainsi, un bateau ne peut pas emmener ses plongeurs sur un récif sans avoir préalablement demandé l’autorisation de celui à qui il appartient. Ou alors, il ne sera pas le bienvenue lors de son prochain passage…
De la même manière, les hôtels obtiennent des concessions pour une durée limitée auprès des familles auxquelles terre et mer appartiennent. Ainsi, le MER a négocié une concession de 60 ans pour s’installer et mettre en place une vaste zone de conservation et de non pêche autour de l’hôtel. Comme ils le disent eux-mêmes, cela fonctionne seulement parce qu’aucun village n’est installé dans cette zone et qu’ils ont aidé les habitants des villages alentour à trouver des sources de revenus alternatives à la pêche (emploi dans l’hôtel, huile de coco etc).
Les initiatives de conservation déjà mises en place au Raja Ampat ont l’air solides et intelligemment menées, en collaboration avec les populations locales qu’elles essayent au maximum d’impliquer, notamment dans les aires marines protégées (MPA – Marine Protected Area). Une grande partie des droits d’entrée au parc marin (un million de roupies indonésiennes par personne, environ 85 euros pour un permis valable un an) soutiennent les projets de santé et d’éducation des communautés de la région.
Selon les zones MPA, la pêche est strictement interdite sur 25 à 95% de la superficie de chacune des aires protégées. Ailleurs, une pêche raisonnable permettant de subvenir aux besoins locaux est privilégiée. Certains villages sont allés un cran plus loin pour renforcer ce concept dans les zones sensibles, en mettant en place le sasi dont j’ai déjà parlé.
C’est un système traditionnel de conservation répandu dans les sociétés du Pacifique, qui vise à protéger les ressources marines en alternant zones, périodes et espèces pêchées selon des règles éditées par les chefs, pour leur laisser le temps de se reproduire. Une sorte de jachère de la mer, quoi !
Une richesse sous-marine incomparable
Au-delà des splendeurs qu’elle offre sur terre, c’est donc surtout pour la richesse de ses fonds sous-marins que la région est connue. Occupant une superficie de 183 000 km2 (la même taille que l’Autriche, eh ouais, rien que ça) située au-dessus d’une zone de convergence de tectonique des plaques, la péninsule est considérée comme l’environnement tropical marin le plus riche et le plus diversifié au monde.
Dans les 2 500 îles qui la composent, on trouve dix fois plus de variétés de coraux que dans les Caraïbes et plus de 1 600 espèces de poissons, dont un certain nombre évidemment spécifiques à la région. A date, les scientifiques ont recensé 40 espèces endémiques de coraux et 35 de poissons. Au Raja Ampat seulement, on trouve plus des trois quart d’espèces de coraux durs et la moitié des coraux mous connus sur la planète.
C’est un festival visuel qui réjouit la rétine, visez plutôt :
En matière de plongée et de snorkelling, je ne vais pas vous mentir : nous nous sommes ré-ga-lés, en dépit d’une visibilité pas toujours optimale, liée à des eaux très « chargées » !!! Bulle est équipé de tout le matériel pour plonger et d’un compresseur pour remplir les bouteilles, alors nous nous en sommes donnés à coeur joie avec Luc, sous le regard vigilant de Julie et des kids qui assuraient gentiment la surveillance en surface.
Sous l’eau, même avec masque et tuba seulement, c’est dingo. Les récifs de coraux sont magnifiques. Il y des bancs de poissons à ne plus savoir qu’en faire. Du gros, du très gros, du petit, du très petit, du bizarre, du coloré, du foncé… il y en a pour tous les goûts. Et comme des images vaudront toujours mieux que des mots (Paris-Match l’a compris avant moi), en voici quelques-unes pour vous faire plonger un peu par procuration.
Deux moments resteront particulièrement gravés dans ma mémoire : les loopings de raies mantas à Wayag, qui tournoyaient jusqu’à l’ivresse pendant des heures pour se nourrir, à 200 mètres du bateau (allez zieuter mon GIF animé si ce n’est déjà fait).
Et en parlant d’ivresse, un requin wobbegong (aussi appelé requin guitare) qui avance tranquillement dans l’eau et s’écrase littéralement sur une table de corail se situant sur sa trajectoire sans le voir. Digne de vidéo gag. Il a fait un bond en arrière avant de tenter de reprendre sa course avec dignité, tandis que je pouffais dans mon détendeur.
Je n’en avais jamais vu jusqu’ici et ils sont nombreux au Raja Ampat. Mais contrairement aux autres requins toujours en mouvement, on les voit généralement posés sur les coraux, tellement confondus avec ceux-ci qu’on a du mal à les repérer. Ils ont une tronche improbable, avec leur tête toute plate entourée d’une sorte de barbichette qui ressemble à des flocons de neige géants.
Organiser un voyage au Raja Ampat
Je n’ai aucune prétention à faire office d’agence de voyage ou préparer un compte-rendu exhaustif des possibilités d’hébergement et de plongée. Mais je peux toutefois essayer de donner quelques infos utiles si vous rêvez d’y aller :
- Gardez en tête que le Raja Ampat n’est pas une destination bon marché.
- Pour commencer, il existe des agences en France spécialisées dans les voyages plongée (je pense notamment à Ultramarina, Aquarev ou Oceanes). Je n’ai d’action dans aucune d’entre elles, mais je suis sûre qu’elles peuvent vous concocter un séjour aux petits oignons ou vous proposer des séjours existants dans leur catalogue.
- Si vous préférez vous organiser vous-même, la partie la plus complexe peut-être est déjà de parvenir jusqu’au Raja Ampat ! Le « port » d’accès principal est l’aéroport de Sorong sur la péninsule de Papouasie occidentale, lui-même atteignable depuis Makassar ou Manado sur l’île de Sulawesi, eux-mêmes assez faciles à rejoindre depuis Jakarta ou Denpasar (en Indonésie), Kuala Lumpur (en Malaisie) ou Singapour. Plusieurs compagnies aériennes desservent Makassar et Manado, mais Garuda ou Air Asia sont sans aucun doute celles qui ont les vols les plus fréquents.
- Depuis Sorong, vous pouvez aisément embarquer sur un liveaboard pour une croisière plongée. Les bateaux sont généralement des phinisi, de jolies embarcations à plusieurs mâts de style indonésien. Je n’ai pas particulièrement de nom à vous donner, ne les ayant moi-même pas pratiqués, mais nous en avons croisé un certain nombre, allant du plus haut de gamme (type Amanikan) au plus abordable (type Pearl of Papua, Mermaid 2 ou Black Manta). Le site Liveaboard Diving est une mine d’information sur les bateaux dans la région.
- Il existe sinon des resorts à terre spécialisés dans les séjours plongée sur plusieurs des îles du Raja Ampat. Ils organisent des transferts en speedboat depuis Sorong, généralement une fois par semaine. Là encore, il s’agit souvent d’hôtels assez haut de gamme (comme le MER au Sud à Misool ou le Raja4Divers au Nord sur Pulau Pef, dont j’ai parlé puisque nous avons mouillé près de chez eux). Dans un article très complet, le blog Petites Bulles d’Ailleurs recense plein d’autres resorts, comme le Sorido Bay Resort ou le Kri Eco Resort sur l’île de Kri, ou le Raja Ampat Dive Lodge.
- On peut plonger toute l’année au Raja Ampat, mais la meilleure période s’étend d’octobre à avril car les conditions météo sont plus propices (moins de vent et mer moins agitée). C’est aussi à cette période que vous aurez le plus de chance de voir des raies mantas.
- Pour plonger au Raja Ampat, vous devrez vous acquitter du permis d’un million de roupies (environ 85 euros), valable un an.
A più tarde !!!
3 réponses
Dominique bernard mon beauf te félicite et me raconte qu’il ne peut le faire lui même car il n’est pas sur Facebook ce qui m’étonne car actuellement je dialogue avec toi sans il me semble passer par facebook. Son mail est dominique.bernard4@Wanadoo.fr . Mets lui un mot Bises
Ma belle, quel bonheur de te lire !!!! Je me sens la tete dans les etoiles et les pieds avec les poissons 😉 On voyage tous avec toi. Beaucoup de bisous, Delph
Bravo,Raphaëlle,votre reportage fait rêver…et Dieut sait si on en a besoin en ce moment !
Espérons que les hommes sauront prendre à temps les mesures nécessaires à la sauvegarde de tels paradis…